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Prière des Nuages de Bénédictions

Un enseignement de Chépa Dorjé Rinpoché, Paris - 2002

Dans cette prière, nous sommes dans le Palais du Flamboiement de la Grande Félicité, celui du Corps de la Sagesse du Discernement de la Félicité-Vacuité. Cela signifie que lorsqu’il y a indifférenciation de l’esprit et du corps, quand nous avons la reconnaissance que notre esprit demeure dans notre corps, nous sommes véritablement dans le Palais de la Félicité-Vacuité, dans cet état du Corps de la Sagesse du Discernement.

Cette prière commence ainsi : « Les nuages de bénédictions de la prière réunissent la puissance des apparences des trois mondes ». Cette phrase sur le rassemblement des apparences du devenir a exactement le même sens que la prière à Kouroukoulé.

Actuellement nous n’avons pas la capacité de maîtriser les apparences, et nous n’avons pas la capacité de reconnaître que les apparences extérieures sont nos propres apparences.

Pourquoi n’avons-nous pas la capacité de reconnaître les apparences telles qu’elles sont ?

Parce que dans notre esprit, il y a toujours d’un côté celui qui voit les apparences, et de l’autre les apparences du devenir. C’est à dire qu’il y a une saisie dualiste entre celui qui voit les apparences et les apparences elles-mêmes. Dans le Vajrayana, nous allons donc transformer ce grand désir que nous avons sur l’ensemble de toutes les apparences. C’est pourquoi dans le Vajrayana nous ne disons pas : « il ne faut pas du tout suivre ces apparences », mais plutôt : « nous allons faire en sorte de ne plus être sous l’emprise du désir des apparences ».
Si nous allons en chemin avec le vent dans le dos, le vent va nous aider à avancer. Si à l’inverse, nous avons le vent de face, la progression deviendra très difficile. Dans le Vajrayana nous avons le vent derrière nous, c’est ce qui est dit dans le texte.

La prière commence pa : OM AH HUNG HRIH qui signifie « d’ordinaire nous désirons le bonheur et la félicité et la nature même de ce bonheur est comme un palais ».

Que signifie « Palais de la Félicité » ?

En voyant un objet par exemple, nous pouvons désirer l’avoir, donc une certaine saisie pour cet objet apparaît : nous voulons le posséder. Il faut reconnaître la nature du désir d’obtenir cet objet. Nous pensons en premier lieu : « je veux cet objet, j’en ai besoin ». Cette pensée nous procure un certain bonheur que nous allons définir comme de la félicité. Si nous reconnaissons cette pensée telle qu’elle est à cet instant, nous allons éprouver, à nouveau, du bonheur et de la félicité. Donc, que nous possédions cet objet ou que nous ne l’ayons pas, cela est sans importance, il nous faut juste reconnaître la nature du désir.

Qu’importe le fait d’avoir l’objet ou non, il convient juste de reconnaître ce désir, puisqu’en en le reconnaissant, nous demeurons dans la félicité qu’il nous procure. Ainsi, le désir de posséder l’objet se transforme en félicité, et tout en reconnaissant que nous n’en avons pas besoin, nous conservons en nous la félicité.

Dans le vers suivant « La nature même de cet objet est vacuité » [1]. Il est dit qu’il y a félicité et que l’essence même de cette félicité est immatérielle, c’est-à-dire qu’elle est vide, vacuité. Si c’est parfaitement clair, c’est la Sagesse du Discernement . Le Corps de Sagesse, de la Sagesse du Discernement, c’est la félicité qui n’a pas de matérialité, qui est vacuité. L’union des deux, c’est-à-dire l’indifférenciation de la félicité et de la vacuité, c’est la Sagesse du Discernement.

La Sagesse du Discernement est incommensurable, impensable par l’esprit, elle ne peut être perçue par personne. Nous ne pouvons pas dire : « ceci est la Félicité », car cet état est dénué de toute matérialité. Il est vacuité, il est indifférencié, cet état est le Corps de la Sagesse du Discernement.

C’est un état sans attachement, et dans cet état de non-attachement la félicité est présente encore et encore, tel un lotus. La Félicité est semblable au Vajra [2], elle est immuable, car elle est sans saisie, elle ne change pas. Cette félicité est immuable parce qu’elle est vacuité.

Cette félicité semblable au Vajra apparaît tels les rayons du soleil, car les rayons du soleil et le soleil ne peuvent être séparés, ils sont une seule et même chose. Si nous avons réalisé et compris cet état, les apparences sont la Félicité.

Quand cet état est réalisé, le méditant obtient un Esprit Courageux [3], il ne peut plus avoir peur des apparences qui émergent, puisqu’il les reconnaît telles qu’elles sont : c’est l’état du Corps de Vérité absolue. Ce corps de Vérité absolue est infini, puisqu’en essence il est vacuité, et qu’en nature il est clarté. Il est aussi appelé Vajradhara, le Corps de Vérité. Il ne peut en être autrement car il est infini. En essence, il est vacuité, en nature, il est clarté. Il est dit que dans cet état, il n’y a besoin d’aucune des activités de ce monde, qu’il n’y a pas besoin de faire quoi que ce soit dans ce monde, car tout se fait naturellement.

Réaliser ces prières

Il est important de réciter continuellement ces prières en en ayant le sens présent à l’esprit. Par exemple, lorsque nous récitons la Prise de Refuge , nous évoquons les Trois Joyaux, les Trois Racines, les canaux, les souffles et les tiglés [4] qui sont à l’intérieur de nous. En récitant ces prières nous utilisons ces canaux, souffles et tiglés. De cette manière, l’esprit pourra devenir stable. Quand il se stabilisera, la félicité apparaîtra en premier ; quand l’esprit deviendra encore plus stable, le Palais de la Grande Félicité se manifestera. A ce stade, le méditant reconnaît que toutes les apparences n’ont pas de vérité intrinsèque. Il ne pourra plus être sous l’emprise des apparences puisqu’il en reconnaîtra la non-réalité. Nous au contraire, pensons que les apparences sont véritables : cela est source de souffrance.

Certaines apparences peuvent êtres acceptées par notre esprit, alors que d’autres, non. C’est dû au fait que nous n’en avons pas la maîtrise. Celui qui a une parfaite maîtrise des apparences peut tout appréhender car peu importe ce qui lui vient à l’esprit, tout est parfaitement accepté, les bonnes choses tout comme les mauvaises.


[1tib. DETONG…

[2état immuable

[3Dénué de peurs

[4gouttes quintessentielles